Vous prendrez bien un dernier verre ? – Comment l’alcool affecte vos performances

Même pour les sportifs les plus assidus, il arrive que l’appel de l’apéro soit le plus fort. Une invitation de la part de votre patron, la célébration d’un évènement particulier ou simplement l’envie de boire une bonne bière peuvent être des évènements suffisants pour qu’un sportif soit amené à boire un peu d’alcool. Si certains se fichent totalement de l‘impact que cela peut avoir sur leur physiologie, d’autres au contraire vont angoisser de ce petit écart.

Qu’en est-il vraiment ? Est-il si grave de boire de l’alcool lorsqu’on s’entraîne ?

 

Voici ce que vous devez retenir…

  • L’alcool n’est pas tant un accumulateur de graisse. Il est plutôt un surpresseur de la combustion des graisses.
  • L’abus d’alcool entraîne plusieurs mécanismes qui vont supprimer la synthèse des protéines musculaires et la récupération après l’entraînement.
  • La prise d’alcool n’est pas un évènement devant vous amener à culpabiliser tant que celle-ci est modérée et ponctuelle.
  • Lorsque celle-ci devient trop fréquente ou trop importante elle peut en revanche nuire en tous points à votre progression.
  • Certaines boissons peuvent avoir des effets positifs, encore faut-il bien les choisir (bière, vin ou cocktails).

 

Alcool et esthétique physique

Connaissez-vous cette légende selon laquelle la bière ferait gonfler le ventre ? Cette dernière est tellement connue qu’elle est passée dans les mœurs et que la boisson s’est vue accusée d’être responsable de créer le fameux “bide à bières”.
Certaines personnes vont accuser l’alcool. Mais, dans ce cas-là, pourquoi la bière ferait-elle davantage grossir que le vin ou même que la vodka ? Ou alors, cela viendrait peut-être des levures ? Mais alors pourquoi la bière sans alcool ne ferait pas autant grossir ? Et pourquoi on recommanderait de consommer de la levure diététique ?

En réalité, une étude de 2012 publiée dans l’European Journal of Clinical Nutrition révèle que la bière n’est pas plus responsable de l’apparition d’une bedaine que n’importe quelle autre boisson alcoolisée ou sucrée. Après avoir testé plus de 20 000 sujets volontaires (7 876 hommes et 12 749 femmes), les scientifiques en charge de cette étude en ont déduit que la bière n’était pas responsable d’une augmentation particulière du tour de taille mais plutôt d’une prise de poids générale si consommée en excès.

 

Le stockage des graisses

L’alcool est un macronutriment au même titre que les glucides, les graisses et les protéines. Il contient plus de calories (7kcal/g) que les glucides et que les protéines et un petit peu moins que les graisses. Le problème avec l’alcool c’est qu’il est perçu par votre corps comme un élément toxique. Votre organisme va donc tout faire pour l’éliminer quitte à ne plus assimiler les autres macronutriments. Résultat ? Vous stockez et vous grossissez ! Afin d’éviter que ce genre de chose se passe, il faudrait simplement se débrouiller pour que l’alcool rentre dans votre total calorique quotidien. Ça, c’est en théorie, si on veut sauver les meubles quoi !

 

La réduction de la masse musculaire et du métabolisme

En allant encore un peu plus loin dans le détail, nous nous rendons compte que l’alcool, bien que consommé dans un total calorique contrôlé peut avoir d’autres effets sur votre shape. Tout d’abord, il va réduire (si ce n’est pas arrêter momentanément) la synthèse protéique[1]. Cela veut dire potentiellement trois choses :

  1. Vos muscles seront endommagés par un entraînement, et vous n’allez pas les réparer. Résultat : vous perdrez du muscle.
  2. Si votre masse musculaire diminue, la rapidité de votre métabolisme aussi. Ceci veut dire que vous serez moins apte à manger autant de calories qu’avant sans grossir.
  3. Du fait que la consommation d’alcool empêchera la combustion de pas mal de nutriments, elle encouragera le stockage des graisses. Or, d’avantage de graisses dans un corps plutôt que de muscles contribuent à abaisser encore le métabolisme et donc amène à grossir plus facilement.

Si ceci arrive une fois de temps en temps, l’impact est tellement minime qu’il ne fera pas réellement de différence à long terme. Cependant, si la prise d’alcool est régulière, alors cela peut devenir problématique.

 

Alcool et performance

Si vous êtes du style “moi le physique je m’en fous du temps que les performances sont là”, attendez un peu de lire la suite.

 

Premièrement, bien que le CrossFit ne soit pas un sport esthétique mais davantage de performances, il est important de retenir que, de façon générale, la force maximale d’un muscle donné est proportionnelle à son diamètre. Si vous limitez votre prise de muscle, vous limitez votre force, donc votre puissance, votre vitesse, etc.

 

Certaines études ont consisté à faire boire des athlètes avant de leur faire faire de l’exercice (oui, moi aussi j’aurais bien aimé voir ça) et les résultats ont été plutôt troublants. Alors que tout le monde s’attendait à ce que le niveau de leurs performances soit abaissé après la prise d’alcool, il s’est avéré que ce n’était pas le cas. Si ces études pourraient laisser penser qu’il n’est pas si grave de boire quand on s’entraîne, une analyse du protocole laisse penser qu’en réalité il en est tout autre.

Au cours de ces tests, les athlètes étaient testés sur des mouvements isométriques (c’est-à-dire maintenir une position – comme le gainage) et des exercices d’endurance à basse intensité. Par une simple observation des habitudes des personnes saoules, ces résultats ne semblent pas tant surprenants quand on y réfléchit :

  1. Lorsque vous êtes ivre, ne vous semble-t-il pas plus facile de rester à une place sans bouger plutôt que de vous à mettre à bouger ?
  2. Les longues marches des étudiants bourrés sont bien connues, notamment quand ils n’ont pas d’autres moyen de rentrer chez eux.

En réalité, il aurait fallu tester les athlètes sur des mouvements entiers et dynamiques avec charge conséquente et sur des efforts intenses (quoi que cela aurait été trop dangereux… Mais si c’est dangereux c’est peut-être qu’entraînement et alcool ne font pas bon ménage). Les résultats n’auraient probablement pas été les mêmes.

 

Rajoutons un peu de sciences là-dedans ! L’alcool a plusieurs effets néfastes connus :

  1. L’alcool déshydrate, notamment via l’augmentation du volume des urines. Vous l’aviez remarqué avec la bière, mais cela reste vrai pour n’importe quel breuvage alcoolisé. Pour être plus précis, pour toute boisson alcoolisée avec au moins 4% d’alcool l’excrétion urinaire augmente de 10mL pour chaque degré d’alcool gagné. Si ça vous paraît peu, dîtes-vous qu’à chaque fois que vous buvez deux bières classique type Heinekacahouète vous perdrez plus d’un demi-litre d’eau (regardez ce que ça fait dans une bouteille et vous comprendrez).
    Or, moins d’eau ça veut dire moins de réactions biochimiques et un sang moins fluide donc incapable de délivrer autant de nutriments et d’oxygène que possible aux muscles. Nécessairement, cela veut dire : moins de force, moins de capacités cardiovasculaires et donc moins de performances. Pour un effort moyennement intense (comme de l’isométrique ou de l’endurance modérée par exemple), les besoins des muscles en oxygène et nutriments ne sont pas énormes, la différence entre les états avec et sans alcool pourrait donc ne pas se faire voir. Pour des efforts intenses, les résultats ne seraient pas les mêmes.
  2. Un des problèmes de la déshydratation est également qu’elle vient influer sur la stabilité de vos articulations. En effet, imaginez que l’eau a cette capacité à créer une sorte de coussin. Elle vient ainsi stabiliser et consolider vos articulations. En plus de vous donner plus de force et d’aisance sur les mouvements, elle participe à vous protéger des blessures[2]. Vous déshydrater revient donc à vous fragiliser.
    Bien sûr, sur les efforts isométriques où on ne bouge pas ou lors d’un exercice d’endurance modéré, la stabilité des articulations est moins mise en jeu que lors d’un squat lourd ce qui pourrait également expliquer les résultats des études citées.
  3. L’alcool vient perturber le sommeil. Un sommeil perturbé équivaut à moins de récupération donc nécessairement à de moins bonnes performances. Encore un phénomène par forcément visible sur des efforts modérés…
  4. Finalement l’alcool vient diminuer l’excitation nerveuse. Voici probablement la pire chose !
    L’ensemble de vos mouvements est piloté par vos nerfs et vos neurones. La production de force, la coordination, l’explosivité, etc, sont toutes contrôlée et initiées par vos neurones. Réduire l’excitabilité nerveuse revient à réduire la capacité de vos neurones à communiquer donc à initier et faire ces actions.

Encore une fois, sur des exercices d’une intensité modérée, un manque d’excitabilité nerveuse ne fera pas trop de différence mais sur un bon gros deadlift bien lourd, cela reste à démontrer…

 

Ce qu’on pourrait recommander

L’alcool n’est clairement pas l’ami de votre shape et de vos performances à long terme mais ne semble pas être si mauvais qu’on le dit. En effet, avec modération et de façon ponctuelle aucune différence physique ne se verra. En ce qui concerne les performances, évitez simplement de boire la veille d’une compétition et de manière démesurée.

Nous sommes et restons des êtres sociaux, refuser une invitation pour s’assurer de ne rien boire n’est pas nécessairement la meilleure des choses, simplement apprenez à dire non au bout d’un moment. D’autant plus que certaines boissons pourraient avoir des effets bénéfiques pour votre santé.

 

Alcool et santé

Commençons par l’alcool préféré des français : le vin ! A choisir une couleur : le rouge. Le vin rouge est celui qui contient le plus de polyphénols, toutes ces petites molécules utiles pour combattre le stress oxydatif, diminuer le risque de maladies cardiovasculaires, réguler la tension artérielle, etc…

 

Deuxième alcool préféré des français ? La bière !

Alors il en est où le bide à bière ? Et bien figurez-vous qu’une consommation modérée de bière se limitant à 330mL par jour pendant 1 mois aurait pour effet d’améliorer les taux d’insuline (hormone du stockage) ainsi que la sensitivité à cette dernière et d’aider à réduire de manière significative le taux de glucose sanguin, chez des patients. Par contre, il se pourrait bien que cela augmente le taux de graisse dans le sang, et ça… Y’a pas bon ! Mais une fois de temps en temps, ça passe !

Note : dans cette même étude, les chercheurs ont réussi à démontrer qu’une bière sans alcool ne possédait pas les bénéfices de la bière avec alcool, donc quitte à choisir, faîtes-vous plaisir !

 

Et les alcools forts ?

Il devient assez dur de s’étendre sur ce sujet. Avec les alcools forts, évitez de tomber dans le piège des cocktails chargés en sucres types whisky-coca, vodka-Redbull ou autre. La tequila seule, les alcools anisés qui se mélangent avec de l’eau ou les alcools purs avec glaçons semblent être les meilleures alternatives ! Et en plus vous aurez l’air de puristes.

 

Rappelons tout de même que ceci est dans les bienfaits de l’alcool ne sont valables qu’avec modération et lorsque la consommation d’alcool est compensée par un contrôle des calories sur les repas. Bref, pensez bien à boire de l’eau pour éviter la déshydratation, l’alcool est mauvais pour la santé tout ça, tout ça et amusez-vous bien !

 

Sources :
Alan Aragon, T. (2019). A Musclehead’s Guide to Alcohol | T Nation. [online] T NATION. Available at: https://www.t-nation.com/diet-fat-loss/muscleheads-guide-to-alcohol

 

TC Luoma, T. (2019). Tip: Booze It Up, Get Healthy at the Same Time | T Nation. [online] T NATION. Available at: https://www.t-nation.com/diet-fat-loss/tip-booze-it-up-get-healthy-at-the-same-time

 

Dr Jade Teta, T. (2019). A Lifter’s Guide to Alcohol | T Nation. [online] T NATION. Available at: https://www.t-nation.com/diet-fat-loss/lifters-guide-to-alcohol].

 

Vella, L. and Cameron-Smith, D. (2010). Alcohol, Athletic Performance and Recovery. Nutrients, 2(8), pp.781-789.
 
Sierksma A. and Kok F.J. (avril 2012) Beer and health : from myths to science. In : European Journal of Clinical Nutrition. doi:10.1038/ejcn.2012.30
Stapscrew.free.fr. (2019). A : Relation tension active-longueur :. [online] Available at: http://stapscrew.free.fr/Texte/Muscle5.htm

 

Poulsen MB, et al. Motor performance during and following acute alcohol intoxication in healthy non-alcoholic subjects. Eur J Appl Physiol. 2007 Nov;101(4):513-23.

 

Clarkson PM, Reichsman F. The effect of ethanol on exercise-induced muscle damage. J Stud Alcohol. 1990 Jan;51(1):19-23.

 

 

[1] Chaque entraînement entraîne des dommages à vos muscles. En quelques sorte ils les détruisent petit à petit. A la suite d’un entraînement, lorsque vous vous reposez, votre muscle va se reconstruire et même grossir grâce à la synthèse protéique !

[2] Le même mécanisme se passe lorsque vous prenez du poids. Une prise de poids est bien souvent accompagnée d’une plus grosse rétention d’eau. Par conséquent, plus de stabilité et donc plus de kilos sur vos barres avec quelques kilos en plus sur votre corps.

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